Le Health Global Access Project (GAP) a été fondé en 1998. Il est né du mouvement de militantisme pour les traitements contre le VIH, alors que les militants étatsuniens ont élargi leurs efforts pour inclure l’accès à des médicaments salvateurs dans les pays du Sud mondial. Les enjeux prioritaires pour l’organisme incluent l’établissement des prix, les droits de propriété intellectuelle ainsi que les investissements des bailleurs de fonds dans la réponse au VIH.

Les employés sont établis aux États-Unis, en Ouganda et au Kenya; leur travail est de portée internationale et se déroule à la fois de façon virtuelle et sur le terrain. En plus d’une petite équipe et d’un conseil d’administration, un comité directeur oriente le travail. Les bénévoles siégeant à ce comité ont un intérêt personnel ou professionnel pour le VIH et ils aident à guider les décisions et les orientations de l’organisme – de fait, 30 % des sièges au conseil d’administration sont réservés à des membres de ce comité.

Le partenariat et la collaboration sont la base même de toutes les activités de Health GAP, qui travaille avec des individus et des organismes à favoriser l’échange de connaissances et de compétences. Health GAP fournit également du soutien à des campagnes de militantisme et à des actions visant des gouvernements locaux ou ciblant des pratiques dans le Sud mondial ainsi que des politiques et pratiques de multinationales actives dans ces pays. Ces partenariats naissent de façon organique, chacun ayant sa propre histoire et son parcours, de l’amorce à la collaboration au présent.

Health GAP (Global Access Project) est un organisme de plaidoyer international qui se consacre à faire en sorte que toutes les personnes vivant avec le VIH aient accès à des médicaments salvateurs à prix abordables. Notre équipe combine le travail concret en matière de politiques et des actions populaires audacieuses afin d’obtenir un accès équitable aux traitements, à des soins et à la prévention pour les personnes vivant avec le VIH et affectées par lui, à l’échelle mondiale. Nous sommes déterminés à abolir les obstacles à l’accès universel à des médicaments salvateurs à prix abordables, pour les personnes qui vivent avec le VIH/sida, comme élément clé d’une stratégie complète pour répondre à la pandémie du sida et arriver à la faire cesser. Nous sommes d’avis que le droit humain à la vie et à la santé doit avoir préséance sur les profits excessifs de l’industrie pharmaceutique et sur l’expansion des droits de brevets.

Comme l’indique Jamila Headley, directrice en charge de la gestion de Health GAP : « D’une certaine façon, le mouvement mondial du VIH a toujours utilisé les TIC, qui incluent les serveurs de liste et les conférences téléphoniques. » En fait, ces outils sont nécessaires « puisqu’ils nous permettent de communiquer avec les personnes qui ne sont pas dans le même espace que nous ». Avec l’apparition de nouveaux outils, de nouvelles possibilités sont apparues et, en 2014, Health GAP a commencé à accroître intentionnellement son recours aux médias sociaux.

À l’époque, l’organisme avait un site Web plutôt statique et ses comptes Facebook et Twitter ne bougeaient pas beaucoup. L’équipe a entrepris de chercher du financement pour embaucher un employé à temps plein aux communications. Une personne très qualifiée et aguerrie en communications politiques a été embauchée, et a aidé Health GAP à devenir plus stratégique dans son utilisation des médias sociaux.

En relativement peu de temps, Health GAP a intégré le pouvoir des outils de médias sociaux comme des éléments clés de son approche en matière de plaidoyer et de militantisme. Voici quelques-unes des leçons que l’organisme a apprises en chemin :

 

Le travail de Health GAP est basé sur le principe que le changement ne se fait pas sans la force des personnes. L’organisme travaille en étroite collaboration avec des mouvements de personnes vivant avec le VIH et avec des regroupements populaires afin de rehausser leur capacité de faire entendre leurs préoccupations et d’influencer la réponse aux enjeux qui affectent leurs vies. Ceci peut être un processus lent, car les pays et systèmes n’accordent pas tous la même place aux groupes et individus de la société civile lorsqu’il s’agit de commenter des processus décisionnels. De plus, les individus et groupes ont divers degrés d’aisance à « perturber » les processus auxquels ils n’ont pas été invités à prendre part.

Dans ce contexte, le travail de Health GAP en est un d’accompagnement. Les employés travaillent avec leurs collaborateurs à explorer quels outils, techniques et approches pourraient être efficaces dans un contexte donné, tout en offrant du soutien sur le terrain. En puisant dans son propre historique en tant qu’organisme ainsi que dans les leçons apprises d’autres groupes comme la Treatment Action Campaign et ACT UP, Health GAP dispose d’une gamme de techniques et d’outils d’organisation et de plaidoyer; de plus, l’organisme demeure éternellement ouvert à explorer de nouveaux outils et de nouvelles idées.

Health GAP et l’ensemble du mouvement du VIH ont sans contredit réussi à provoquer des changements considérables aux échelons local, national et international avant l’avènement des médias sociaux. Cependant, ces outils se sont ajoutés à l’arsenal existant et offrent de nouvelles possibilités d’organisation et de communication. De fait, la combinaison médias sociaux et actions directes peut être très puissante.

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WhatsApp est un nouvel outil intéressant qui est apparu il y a quelques années. Cette application de messagerie directe s’avère spécialement pratique pour planifier des actions directes et pour coordonner en temps opportun des composantes multiples et changeantes.

Global advocates gather during the High-Level Meeting on Ending AIDS in New York - June, 2016

Global advocates gather during the High-Level Meeting on Ending AIDS in New York – June, 2016

Health GAP a amorcé la création d’un groupe WhatsApp avant la Réunion de haut niveau des Nations Unies sur la fin du sida, qui s’est tenue à New York en juin 2016. La réunion rassemblait des décideurs, y compris dix chefs d’État et plus de 60 ministres, des personnes vivant avec le VIH, des représentants de la société civile, d’organismes internationaux et du secteur privé ainsi que des chercheurs; il s’agissait d’une occasion de premier ordre pour exprimer d’importantes préoccupations à la communauté mondiale du VIH. À l’aide de WhatsApp, les membres du groupe ont pu communiquer et coordonner leurs actions concertées – y compris de faire en sorte que tous leurs téléphones se mettent à sonner en même temps, et déclencher des crises de toux collective pendant certains exposés.

Le groupe a été ravivé et élargi à l’occasion du Congrès international sur le sida, tenu à Durban en juillet 2016. Health GAP a utilité WhatsApp pour travailler avec des collaborateurs à organiser des manifestations planifiées et improvisées, dont une mobilisation massive dans les rues de Durban le jour de l’ouverture du congrès, organisée avec la Treatment Action Campaign et Section 27. Pendant cette démonstration,  6 000 militants de l’Afrique du Sud et du monde entier se sont réunis pour exiger que les leaders mondiaux ne laissent pas tomber les personnes vivant avec le VIH.

India-LawyerPendant le congrès, un sous-groupe a également été créé sur WhatsApp afin de répondre à un autre enjeu clé – l’orientation du Gouvernement de l’Inde. Ce dernier a resserré l’étau sur les groupes de la société civile et a cédé à la pression politique des États-Unis et des multinationales pharmaceutiques en faisant reculer le développement de médicaments génériques de qualité. Pendant que ce plus petit groupe utilisait WhatsApp pour voir à la coordination d’activités, toute l’information sur les événements planifiés était relayée au groupe partagée publiquement par d’autres moyens comme des gazouillis sur Twitter et des communiqués de presse officiels.

Le groupe WhatsApp, qui compte à présent plus de 256 participants et qui continue de grandir, est particulièrement utile pour relier des militants et les aider à s’organiser lors de grands rassemblements internationaux (d’autres activités sont d’ailleurs prévues pour le congrès de l’IAS en 2017, qui aura lieu à Paris en juillet). En marge de ces événements, les membres y sont moins actifs mais ils utilisent tout de même la plateforme pour partager de l’information et pour s’informer les uns les autres de leurs plus petites actions à divers endroits du monde.

WhatsApp est un outil fabuleux parce qu’il est gratuit, fiable, accessible et fonctionne même en situation de bande passante faible. Vous pouvez communiquer de façon coordonnée avec un groupe qui compte des centaines de membres; et l’outil est raisonnablement sûr, puisque les données sont encodées. Il est important de signaler cependant que WhatsApp n’est pas aussi sécurisé que d’autres plateformes de messagerie (comme Signal). Health GAP s’assure que les gens soient conscients des limites possibles des outils qu’ils utilisent, et du fait qu’ils ne peuvent pas leur assurer une sécurité complète. L’organisme aura recours à un consultant spécialisé afin de résoudre certains des enjeux de sécurité liés à ce travail et à l’utilisation de plateformes et outils nouveaux.

Du côté logistique, le groupe WhatsApp est relativement facile à maintenir. Le groupe compte une poignée d’administrateurs. Les membres sont ajoutés après avoir rempli un formulaire Google expliquant qui ils sont et quel est leur intérêt pour se joindre au groupe. Des lignes directrices initiales ont été développées lors de la création du groupe, et les membres ont été invités à les commenter et à les enrichir.

Dans une application de messagerie directe, on ne peut pas contrôler tout ce qui est partagé, et ceci a causé certains moments de tension dans le groupe. Il y a eu des différends concernant la langue, puisque certains membres diffusaient des messages en espagnol que tout le monde ne comprenait pas. La langue par défaut a été établie comme étant l’anglais, puisque la majorité des membres sont capables de communiquer dans cette langue. Health GAP incite les membres à se faire dépositaires du groupe, y compris quant aux tâches de régulation et de suivi réciproques. En général, cette approche fonctionne sans heurts et réussit bien.

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ugpride-1Au début d’août 2016, la police a pris d’assaut un événement se déroulant lors des célébrations de la Fierté en Ouganda. Ce qui avait commencé comme une célébration de courage et d’amour a vite tourné en une situation inquiétante, quand la police a abruptement mis fin aux festivités et a appréhendé des gens. Des exhortations à la violence populaire ont été lancées pour la parade de la Fierté du lendemain, ce qui a conduit à l’annulation de la marche.

Les individus qui étaient présents en Ouganda ainsi que leurs sympathisants aux quatre coins du monde se sont rapidement tournés vers Twitter pour dénoncer les injustices à mesure qu’elles avaient lieu. À l’aide du mot-clic #ugpride2016, individus et organismes ont gazouillé leur indignation et leur appui, tout en recevant une couverture en direct des événements sur le terrain, de la part d’autres usagers de Twitter.

Health GAP a participé à la conversation presque immédiatement, en partageant l’information avec ses abonnés. L’organisme a également gazouill, et étiqueté des personnes influentes, y compris l’ambassadeur étatsunien en Ouganda, avec lequel une conversation hors ligne était alors en cours. Ces interventions sur Twitter ont également aidé à augmenter la couverture médiatique des événements, à mesure qu’ils se produisaient, mettant en relief l’influence des médias sociaux sur ce qui est présenté dans les médias traditionnels.

La situation demeure certes très difficile pour les individus et communautés LGBTQ+ de l’Ouganda, mais il y a un certain degré de réconfort dans l’idée que les yeux du monde entier et de la twittosphère sont rivés sur la situation et que des gens sont disposés à la dénoncer.

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Dans ce contexte, Twitter a favorisé le partage d’information et de nouvelles à mesure que les événements se déroulaient. Cela a permis de mobiliser des influenceurs clés qui ont été mis au courant de la situation et à qui on a demandé d’y répondre, tout en donnant à des gens et des organismes du monde entier la possibilité d’exprimer leur appui et leurs réflexions.

 

FAITS INTÉRESSANTS :

  • La question du financement des activités liées aux médias sociaux et aux TIC est toujours une considération importante; Health GAP a constaté que l’Open Society Foundation était particulièrement encline à soutenir ce genre de travail.
  • Health GAP abrite la Student Global AIDS Campaign, un réseau national d’étudiants et de jeunes militants qui luttent pour mettre fin au VIH/sida; cette campagne responsabilise les gouvernements, les corporations et la société civile par un plaidoyer politique éclairé et un militantisme basé sur l’action directe.
  • Lors de la Journée mondiale du sida de 2016, Health GAP a organisé une manifestation et une action de désobéissance civile pour dénoncer les propositions mortelles de Paul Ryan, président de la Chambre des représentants aux États-Unis. Dix militants ont été arrêtés à l’extérieur du bureau de Ryan, alors qu’ils lui demandaient de retirer ses propositions qui consistaient à abroger l’Affordable Care Act, à privatiser le régime Medicare, à compresser radicalement le régime Medicaid et à couper des milliards de dollars en fonds « discrétionnaires », y compris du budget de programmes mondiaux en matière de VIH/sida. La manifestation a été annoncée publiquement et publicisée dans les médias sociaux, mais Health GAP a pris garde de ne pas dévoiler d’information concernant l’action de désobéissance civile prévue, afin de ne pas nuire aux personnes arrêtées et aux plans d’action dans l’édifice du Congrès.

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